Opéra Porno

Ce week-end en famille dans une maison de campagne avait tout pour être réussi. Mais il a suffi que la grand-mère reste bloquée dans la voiture, que le père se tranche bêtement l'index en voulant surveiller sa nouvelle épouse et que le fils éprouve de l'émoi pour sa nouvelle belle-mère pour que tout dérape. Résultat : la grand-mère libérée vomit dans les bosquets, le doigt du père gît dans le frigo, le fils priape se perd dans la forêt et la belle-mère s'ennuie, retranchée dans les cabinets...

Parce que le chant lyrique, à bien y regarder, n'est qu'un catalogue de bouches grandes ouvertes, de lèvres humides, d'yeux révulsés, de corps contractés, de poitrines explosives, de poings crispés et de mains tendues vers les cieux, Pierre Guillois (dont vous avez pu voir Grand fracas issu de rien en 2013 et Bigre en 2015) a eu envie de mélanger l'opéra-bouffe et une autre tradition plus polissonne, pleine de bêtes à deux dos, de positions abracadabrantesques, de penchants libidineux et de perversités plus ou moins avouables.

Les quatre comédiens / chanteurs présents sur le plateau ne se livreront pas pour autant à d'intempestifs effeuillages (quoique), pas plus que les deux musiciens qui les accompagnent. Mais cela ne les empêchera pas de pulvériser l'ordre familial et son ciment moral à coups d'horreurs et de pratiques érotiques simulées, ni de se jouer des plus grands tabous et des peurs les plus enfouies en emmenant la pièce très loin - vraiment très loin. Grand Dieu ! Pourquoi tant de provocation et d'irrespect ? Mais pour vous faire connaître, cher public, la jouissance extrême de celui qui rit, qui est horrifié de son rire et qui rit encore plus de son propre effroi...